DUNE 2 : « colossal et jamais vu » ?

Partout en ville de grandes affiches l’affirment, la seconde partie de ‘DUNE‘ serait « colossal et jamais vu ». Spectaculaire, assurément. « Jamais vu » serait faire preuve d’amnésie, d’ignorance, voire se plier à la cancel culture. Denis Villeneuve confirme les réserves pointées lors de la sortie du premier volet. S’il reste très fidèle au roman de Frank Herbert, son adaptation est aussi très marquée par l’époque actuelle. C’est-à-dire très woke.

En d’autres temps, le cinéma de l’imaginaire accueillait des artistes venus de la marge. Des Jodorwosky, des Lynch par exemple. Aujourd’hui la contre-culture a été avalée par l’industrie. Les sommes investies sont énormes tout comme les enjeux économiques. Pas le droit à l’erreur, il ne faut ni choquer ni déranger, mais plaire au plus grand nombre. Les réalisateurs, hommes ou femmes, doivent se plier aux impératifs du marché et d’une bonne partie du public. Et la plupart le font avec conviction. Denis Villeneuve n’est pas le pire des tâcherons, pourtant. Mais le résultat est là et il n’est pas bon. Tout en se voulant fidèle au premier roman de la saga « Dune », cette seconde partie oublie volontairement certains personnages. On trouve bien une lady Fenring (Léa Seydoux) mais pas de trace du comte Fenring. Ces deux personnages ne sont pas indispensables, mais le choix des auteurs est ici de mettre les femmes en avant. Pourquoi pas. Sauf que la quantité ne fait pas la qualité. Et Alia Atreides ? Jessica (Rebecca Ferguson), sa mère, passe tout le film enceinte alors que plusieurs mois, voire des années passent. C’est un peu long pour une enfant censée être précoce… Le personnage d’Alia est pourtant, lui, très important dans l’histoire. Pourquoi cette absence ? On aperçoit brièvement Sainte Alia du Couteau, dite l’Abomination, dans une vision de son frère Paul Muad’Dib. Et l’actrice qui l’interprète à l’âge adulte est… furieusement réjouissante. Mais c’est bien trop peu devant les révisionnismes et les longueurs de l’histoire, la triste sobriété des décors et des costumes, et les grondements de Hans Zimmer car on ne peut vraiment pas parler de musique de film ici.

« Long et assommant » serait une accroche mieux appropriée pour ce ‘Dune : deuxième partie‘. Parfois, avec les adaptations, il vaut mieux une trahison qui transcende son sujet qu’un travail d’élève appliqué mais chiant. Entre la folie baroque d’un David Lynch et les ronds dans le sable d’un Denis Villeneuve, le choix est vite fait.

« Longue vie aux combattants ! » Longue vie aux résistants !

5 commentaires sur “DUNE 2 : « colossal et jamais vu » ?

  1. Cette deuxième moitié n’aura donc pas su corriger ton jugement premier. Cette Arrakis n’est pas la tienne, et je le comprends. Malgré tout le respect et les merveilleux souvenirs que je garde de la version Lynch, grâce à Villeneuve, j’ai enfin vu « Dune » sur grand écran.

    Certes, tout n’est pas parfait, j’évoque même mes réserves sur l’amorce du film. Mais Villeneuve a su me retourner dès que Jessica passe l’épreuve de l’Eau de Vie. Et je trouve cette idée de fusionner les corps et les Voix de Jessica et Alia une merveilleuse idée qui évite, comme l’a fat Lynch, de représenter une Alia plus âgée que ce qu’elle doit être, voire de faire parler une enfant de trois ans comme un adulte (ce qui aurait été assez ridicule à l’image il faut bien l’admettre). Je trouve cette version donc bien plus honnête vis-à-vis du roman. Son caractère maléfique permet aussi de deviner derrière tout cela le poison Harkonnen qui n’est pas forcément le grand perdant que l’on croit.

    1. Lynch a proposé un fantastique film de monstres, lui qui les aime tant. Villeneuve n’a pas un imaginaire aussi riche. Au final je trouve sa double tentative terne, sans émotion, interminable et assourdissante (merci Hans Zimmer).

      1. Certes, l’imaginaire de Lynch (déjà très contrôlé par De Laurentiis en arrière-plan) n’est pas celui de Villeneuve. Tout comme le film de Jodorowsky aurait offert une vision plus psychédélique et New Age. Chaque auteur imprime sa marque, sa vision. Celle de Villeneuve charrie des images, des sensations, des impressions de désert déjà croisées dans « Blade Runner 2049 », « Sicario » et même « Incendies ». On a aussi le droit de ne pas aimer le style de Villeneuve.

      2. Autre problème chez Villeneuve, ses images ne me donne jamais la sensation de chaleur, de soif. On parle quand même d’un monde aux températures extrêmes. Du coup « Dune », pour moi, ça reste des romans et un film de Lynch.

      3. C’est juste. Mais les bédouins fremen ont appris à composer avec cette chaleur.
        Et puis, de mémoire, il n’y avait pas non plus chez Lynch cette sensation de chaleur.
        On peut aussi reprocher à Villeneuve d’avoir laissé de côté les mentats (qu’est devenu Thufir ?) Malgré tout, la version Villeneuve me semble être la forme la plus proche de ce que représente Dune lorsque je lis le roman.
        Je lui souhaite néanmoins bon courage pour adapter le Messie, avec son Ghola et les troublantes danseurs-visages tleilaxu aux contours autrement plus abscons et théologiques.

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